Cheikh Djemaï, né en 1954 près de Maghnia en Algérie, est un réalisateur franco-algérien. Venu avec sa famille rejoindre un père passé un temps par les mines du Nord, Cheikh Djemaï grandit après 1959 au bidonville de la rue des Prés puis à la cité de transit André Doucet dite « cité vieille », tous deux situés au quartier du Chemin de l’île. Cheikh Djemaï sort du logement exceptionnel dans les années 1970, meurtri par les brimades et les orientations forcées dans les écoles Voltaire et au collège Joliot Curie où il est orienté en CEP moulage. Il se rapproche du théâtre (comme éclairagiste au théâtre des Amandiers), de la culture et de la politique grâce à son frère aîné, lui-même lié aux militants chrétiens investis auprès des immigrés à Nanterre. Pendant ces dix années passées au théâtre des Amandiers de Nanterre, il côtoie les plus grands : compagnons de route de Pierre Debauche, Antoine Vitez, Patrice Chéreau, Roger Planchon, Daniel Mesguish, à Wajda. Peu à peu, il se lance dans une carrière de réalisateur, de fiction puis de documentaire. Toujours Nanterrien, son regard reste intimement lié aux histoires de l’immigration. Après avoir collaboré à diverses émissions ainsi qu'à des magazines télévisés, il se lance dans la réalisation de films plus personnels. Il réalise : "La Nuit Du Doute" (une fiction) drame des jeunes-filles maghrébines ; "Mémoire Du Voyage", document percutant et émouvant sur la communauté tzigane ; "Paroles D'Exil", bouleversant témoignage sur ceux qui ont du fuir le terrorisme en Algérie ; "Les Charbonniers De Surface" (1996), sur un métier d'un autre temps ; "Frantz Fanon" (2001), dans lequel il restitue l'itinéraire de ce médecin-psychiatre d'origine antillaise, cet écrivain, ce visionnaire, ce militant, qui après avoir combattu auprès des forces de la France libre pendant la seconde guerre mondiale, s'engage corps et âme dans la bataille de la décolonisation et de l'indépendance de l'Algérie ; "Le Onze Du FLN", dans lequel il évoque l'épopée des footballeurs vedettes algériens qui ont quitté en 1958 leurs clubs français pour créer la première équipe algérienne en pleine guerre d'Algérie dans "Anonymes" (1998). Cheikh Djemaï nous ouvre les yeux sur une réalité souvent occultée, et perpétue la mémoire de femmes et d'hommes dont le souvenir doit rester vivant et intact. Ce réalisateur exigeant, Homme de colère et de passion, fait souffler comme un vent d'espérance et donne un nouveau sens au mot solidarité. Cheikh Djemaï permet de nous sentir vivant, combattant. Il encourage à lutter contre l'amnésie comme dans son film "Nanterre, Une Mémoire En Miroir" (2006) et nous rappelle notre faculté d'indignation. En 2018 il sort le documentaire "La Bataille d'Alger, l'empreinte"; dans ce film Cheikh Djemaï revient sur la genèse du long métrage de Gillo Pontecorvo, La Bataille d’Alger (1965). Par le biais d’images d’archives, d’extraits du film et d’interviews de personnalités, le cinéaste retrace le parcours d’une œuvre majeure - des événements de la Casbah algéroise (1956-1957) à la remise du Lion d’Or entrainant la colère de la délégation française à Venise – qui a laissé son empreinte autant dans l’histoire du cinéma que dans celle de l’Algérie.